lundi 8 septembre 2014

The time of my life.

Troisième jour de visite. Nous quittons Charleston direction les splendeurs naturelles des parcs naturels d'état et nationaux de West Virginia du sud et de Virginia, que nous sillonnerons pendant 3 jours.

La première visite du matin sera New River Gorge National River et son pont. La New River coule dans des canyons profonds, observables depuis de nombreux belvédères dans la forêt. Le point d'observation du gigantesque pont nécessite sa traversée préalable puisque l'on arrive par le nord-ouest. Ce n'est qu'une fois au belvédère qu'on se rend compte de ce qu'il surplombe car les murets de protection sur le pont obstruent la vue de part et d'autre du pont.




 Un chemin de randonnée passe en dessous du pont:




Nous avons ensuite sillonné le Babcock State Park, qui regorge de chemins de randonnée, de belvédères, de chutes, de rapides, de cascades, de forêts. L'un des chemins empruntés nous a menés au creux d'une forêt qui propose une dizaine de cabanes en bois (chalets) à la location:


Il est à noter que deux d'entre eux sont accessibles pour des personnes en fauteuil:


Dans notre route vers le sud-est de l'Etat, nous avons suivi l'indication "Grandview", dont le nom promettait effectivement une vue grandiose. Nous n'avons pas été déçus, mais fort surpris car la route qui y mène ne surplombe rien du tout. C'est après nous être garés et avoir suivi un petit chemin derrière le parking que le spectacle se dévoile.

Grandview offre une vue sur le point le plus profond du canyon de la New River Gorge:



avec dans le fond une vue sur les montagnes.

Les forêts regorgent de biches et de faons, que nous avons vus à moult reprises:
 


(L'animal est vif, moins que la photographe qui n'a de fait que des prises de vue floues de ces bêtes!)

J'avais également repéré sur internet une photo d'un vieux moulin à eau que je souhaitais voir. Nous l'avons trouvé! Merci Google et Google Maps!

The Glade Creek Grist Mill

Joli, n'est-ce pas?

Le reste de la journée a été pour moi fort euphorisant. En fait, l'excitation était montée depuis deux jours. Laissez-moi vous raconter comment une banale coïncidence s'est transformée en savoureux moment Nutella.

Le lundi en fin d'après-midi, premier jour de notre voyage, poussés par une faim de loup, nous cherchons désespérément un endroit pour nous restaurer. Je sais que j'ai toujours dit qu'en Amérique, on trouvait de tout en abondance, mais croyez-moi sur parole, dans les montagnes ou les coins reculés de cambrousse, il faut se brosser pour trouver un "restaurant" digne de ce nom, fût-il un banal McDonald's ou Burger King, pourtant à foison.

Petite parenthèse sociologique: la West Virginia , et les Appalaches plus généralement, sont réputées pour être peuplées de hillbillies, l'équivalent du péquenaud français, le brave gars inculte et crados qui vit dans son trou en ignorant que le monde dépasse les limites du triangle maison (ou caravane)-magasin- bar (et travail s'il en a un). Je croyais d'abord que Joseph plaisantait, mais en fait, non. La West Virginia est VRAIMENT peuplée de hillibillies. On en a eu pour notre grade, qui vivant dans des mobilhomes cradingues, qui, assis avec deux amis sur un banc de la station service où nous faisions le plein, avec leur salopette et leur chemise sale à carreaux, oisifs jusqu'à en être trop paresseux pour échanger des séquences de mots appelés phrases. Ils regardaient le monde s'agiter autour d'eux. Spectacle tragi-comique de la condition humaine. Comique car les hillbillies sont tels que montrés dans les films, tragique car ils existent vraiment, mais ma foi, ils semblent heureux comme ça. Where ignorance is bliss, 'tis folly to be wise a dit le poète anglais Thomas Gray (l'équivalent  en français de  "L'ignorance est la condition nécessaire au bonheur des hommes", Anatole France). 

Pour en revenir à notre quête de boustifaille, nous avons bien trouvé quelques bouibouis hillbilly mais nous avons sagement patienté jusqu'à tomber sur un site indiqué sur la route: Rocky Gap. Nous arrivons sur un lac, dominé par une immense bâtisse, lieu de villégiature familial à la moyenne d'âge plutôt élevée, avec casino et j'en passe. C'est là que nous avons appris, avec une peine immense, la disparition de Robin Williams. Là n'est pas mon propos, mais ce lieu restera pour moi associé à cette nouvelle dramatique qui passait en boucle sur les écrans géants du restaurant où nous attendions d'avoir une table.

L'attente étant trop longue, nous décidons de poursuivre notre route jusqu'au prochain Burger King salvateur. Tout en roulant, je dis à Joseph que ce lieu ressemble étrangement aux images du film Dirty Dancing, film vu, sans mentir, une douzaine de fois me concernant. Le film de mon adolescence, avec ses rêves de premier amour de vacances. Le vrai film de filles des années 90, quoi (moins le charme de Patrick Swayze, qui, je dois l'avouer, ne m'a jamais rien fait de spécial).

Un lac, une pension de vacances familiale, des activités à la pelle... Je demande à Joseph si à tout hasard il connaît le lieu du tournage du film, sait-on jamais, les coïncidences, des fois...

Réponse de mec: il n'a jamais vu ce film et ça ne lui dit rien de le voir. OK mais ce n'est pas ma question. Le soir, à l'hôtel, je me précipite sur internet pour rechercher l'information. Je manque de m'étouffer tellement je n'en crois pas mes yeux: le film a été tourné à une demi-heure de l'hôtel prévu le troisième jour de notre périple! WOW! Je DOIS aller voir ça!

J'ai donc eu raison de me fier à cette étrange sensation de déjà vu provoquée par le passage à Rocky Gap. C'est avec une grande impatience que j'attendais la visite quasi-impromptue du site de tournage de Dirty Dancing.

Après avoir continué notre route dans le parc naturel et les forêts, monté une toute petite route de montagne assombrie par les arbres d'une forêt très dense, nous arrivons à Pembroke, en Virginie. Je n'ose même pas appeler cela un village, c'est tout au plus un bourg.

La "pension Kellerman" du film est là, devant nous. Elle s'appelle en fait Mountain Lake Lodge, et c'est un lieu de villégiature très calme et peu fréquenté en bord d'un lac aujourd'hui quasiment asséché.

Nous nous promenons sur le site, tout en dénivelé. Je reconnais le bâtiment principal (ladite pension Kellerman), le gazon où grouillent les touristes au début du film au cours des activités organisées par la pension, et surtout, je repère le gazebo, équivalent d'un kiosque pour nous. Le fameux gazebo où Penny donne son cours de merengue aux petits vieux et où Bébé vient discuter avec son père après s'être embrouillée avec lui, avec vue sur le lac. Je repère aussi un peu plus loin la maison de la famille Houseman dans le film. Rien n'a vraiment changé depuis la fin des années 80, période de réalisation du film. On reconnaît bien tout l'environnement même si d'autres scènes du film ont été tournées plus au sud, à Lake Lure, en Caroline du Nord (sans doute une prochaine destination!).

Pour ceux qui ne connaissent pas le film, le titre de cet article est une référence à la scène finale du film.

Le cottage de la famille Houseman dans le film.

Pierre commémorative pour Patrick Swayze, à côté du kiosque. 

La vue sur le "lac", quasiment asséché. Les mêmes chaises que dans le film!

La "pension Kellerman", alias en vrai Mountain Lake Lodge.
Le lendemain, plein de sensations assuré à la découverte d'une fantastique région naturelle, réputée plus belle route des Etats-Unis: les Blue Ridge Mountains. Routes de crête pittoresques louées par John Denver, avec des vues incroyables sur les vallées et sommets lointains, le tout dans une atmosphère bleutée, due à l'isoprène dégagé par les arbres.

La Blue Ridge Parkway s'étend sur 755 km, depuis les Great Smoky Mountains et la Réserve indienne Cherokee en Caroline du Nord jusqu'au parc de Shenandoah, en Virginie. Nous avons emprunté la portion nord au départ de Roanoke jusque Harrissonburg, avant de poursuivre sur la Skyline Drive, route classée nationalement pour ses vues pittoresques.

Difficile de retranscrire avec des mots ce de quoi les yeux se régalent pendant les sept heures de route quotidiennes. On pourra trouver qu'il n'y a rien d'exceptionnel par rapport aux Alpes, mais la différence est l'étendue de ces paysages, à perte de vue. Nous avons imaginé sans peine des Indiens sur leurs chevaux, tels que dans le films, en train de dominer les plaines du haut des crêtes escarpées. A défaut d'aller voir cela soi-même, voici quelques clichés qui donnent un aperçu bien pâle de la majesté de ces lieux:





J'ai même pu, de façon inattendue, rencontrer un specimen que je souhaitais voir mais sans grand espoir: un ours noir. Les ours sont très répandus aux Etats-Unis dans les forêts et les régions montagneuses. C'est une rencontreuse souvent dangereuse donc mieux vaut être dans sa voiture pour les voir, ce qui était notre cas puisque notre brave ami traversait la route au moment où nous amorcions un virage dans la forêt. Il n'était plus tout à fait ourson, mais il n'avait pas encore atteint sa taille adulte. Cette rencontre a achevé de donner un tour magique à ce voyage. Tous les ingrédients du dépaysement y étaient.

Une fois de plus, c'est avec beaucoup de délectation que je repense à ces moments savoureux, hors du temps, qui me rassérènent et me donnent des envies d'encore. Le monde est tellement vaste et les merveilles ne sont parfois pas loin de nos habitations. Je ne parle pas des 6000 km qui me séparent des Etats-Unis mais des splendeurs qui nous entourent et que nous oublions trop souvent.