samedi 25 juillet 2015

Voyage gustatif en Creuse.

Mon escapade creusoise, dont je vous reparlerai en détails ultérieurement, m'a amenée à fréquenter deux tables des Toques Blanches du Limousin.

La première, celle de Stéphane Villetorte, chef du restaurant Influence, se situe à La Chapelle Taillefert, à environ 10km au sud de Guéret.

Il y propose des plats du terroir cuisinés avec soin. Je me suis régalée d'une excellente tête de veau sauce gribiche, moelleuse, fondante et relevée à souhait, d'une belle pièce de boeuf d'une ferme voisine, et de fromages locaux, le tout pour un prix plus que raisonnable. J'y ai passé un agréable moment gustatif avec l'immense plaisir de constater que l'accueil et la satisfaction du client primaient avant tout. C'est plutôt rare d'avoir un restaurateur qui se préoccupe à ce point de savoir si tout se passe bien en étant autant à l'écoute d'éventuelles remarques.

Voici son site internet: http://www.restaurant-influence.com/


ainsi que le parcours de ce chef sur ce sympathique site d'"enquête culinaire en Limousin":
http://www.lachataignearoulettes.fr/dans-la-cuisine-de-stephane-villetorte/

La deuxième table est Le Viaduc, que j'ai moins apprécié malgré une réelle inventivité dans l'assiette (j'ai découvert un succulent tatin de fenouil à l'orange pour accompagner un poisson, vraiment fin et rafraîchissant). L'accueil y était parfait, les attentions nombreuses et appréciées, mais je trouve que le rapport qualité-prix est meilleur dans l'adresse précédente.

Il me semblait légitime de leur faire un petit coup de pub au vu des deux belles soirées que j'y ai passées et des attentions nombreuses dont ils m'ont gratifiée.

Si vous êtes de passage par la Creuse (ce que je vous engage à faire et pas seulement: un simple passage ne suffit pas pour découvrir toutes les splendeurs de cette belle région), vous savez maintenant ce qu'il vous reste à faire!

samedi 20 juin 2015

Point.




L'expérience était risquée et mouvementée. Le coeur a beaucoup, beaucoup essayé. La raison a tranché.  

2015 ne s'annonçait pas pour Joseph et moi sous les meilleurs auspices et nous avons à présent décidé, non sans tristesse, de poursuivre chacun notre route.

Restent quatre années riches en événements, en voyages, en émotions, en découvertes. Nous tâcherons de garder le meilleur.

J'ignore encore à l'heure où je vous écris ce qu'il adviendra de ce blog. Il se peut que je le poursuive au gré de mes voyages, intérieurs ou non. Il se peut qu'il s'arrête là. Je ne sais pas encore.

Merci en tout cas à tous les lecteurs fidèles qui m'ont accompagnée sur le chemin. J'ai été contente de partager mes morceaux de vie avec vous.

Portez-vous bien et accueillez l'été; il vous attend.

dimanche 17 mai 2015

Musée Salvador Dalí de St. Petersburg, Floride.

La côte ouest de la Floride.

Ses retraités, ses plages de sable blanc, ses palmiers, ses stades de baseball et de football américain... et son musée Dalí.


Qui aurait pensé trouver sur cette côte subtropicale un lieu d'art qui regroupe autant de pièces maîtresses d'un artiste européen du XXè siècle? Certainement pas moi. Deux ans que je vais en Floride plusieurs fois par an dans la plus grande ignorance de ce musée à seulement une heure de route de Venice. Ai-je des oeillères? Ma curiosité et mon efficacité de recherche sur internet ont-elles faibli ces derniers mois? Toujours est-il que c'est par le plus grand des hasards que je suis tombée mi-avril sur une page internet qui faisait de la publicité pour une exposition intitulé "Dalí & da Vinci: Where Minds, Machines and Masterpieces Meet".


Intéressant!

Je regarde où elle se trouve: "musée Dalí de St. Petersburg". St. Petersburg est une ville en périphérie de  l'agglomération de Tampa, soit à une heure de route de la maison. Renseignement pris, ce musée abrite en fait l'une des plus grandes collections d'oeuvres de Dalí.


Comment cette collection est-elle arrivée dans cette ville de Floride?


Elle est issue d'une collection privée du couple Reynolds and Eleanor Morse, qui avait sympathisé avec Dalí et Gala au début des années 40. Salavador Dalí et Gala ont résidé aux Etats-Unis de 1939 à 1947, pour échapper aux guerres (guerre civile en Espagne, guerre en France alors occupée par les Allemands), mais aussi car Dalí a compris très vite que son succès passerait par le Nouveau-Monde. Il s'intégra à ce titre la haute société new-yorkaise, trouvant ainsi de nombreux mécènes et continuant à se forger une réputation d'artiste incontournable et avant-gardiste, et déjà recommandé par Picasso. Le couple Morse a acheté de très nombreuses oeuvres de Dalí, qu'ils ont d'abord exposées dans leur domicile de Cleveland, Ohio, avant d'ouvrir une annexe à côté de leur bureau, toujours dans l'Ohio.


Victimes de leur succès pendant les années 70, ils se mettent à la recherche d'un endroit plus approprié. Cette quête a créé un intérêt national et un hangar maritime de St. Petersburg en Floride a été réhabilité dans le but de permettre cette exposition permanente de leur collection. C'est ainsi que la collection y a a atterri en 1982, avant d'être déplacée dans l'actuelle bâtisse créée spécifiquement dès 2008 avec cette structure en verre appelée "Enigma":




Il est à noter que les murs ont été conçus pour résister aux ouragans, fréquents dans cette région. 

Les extérieurs soignés reprennent des thématiques daliniennes: la fameuse moustache, que Dalí avait adoptée en référence à Velázquez, qu'il vénérait (Velázquez qui est à l'honneur dans une exposition qui lui est consacrée au Grand Palais à Paris jusqu'au 23 juillet 2015 et que j'ai eu l'immense plaisir de savourer le mois dernier):






mais aussi un dallage consacré au nombre, au rectangle et à la spirale d'or:



L'exposition Dalí & da Vinci était vraiment intéressante du point de vue des influences artistiques. L'exploitation, la transformation, l'interprétation d'oeuvres maîtresses du grand Léonard que Dalí considérait comme un génie absolu (au même titre que Velázquez, Vermeer, Raphaël et Picasso) dans un contexte temporel autre est visible dans les créations de Dalí. Pour l'anecdotedans son Analyse dalinienne des valeurs comparées des grands peintresDalí a attribué un 20/20 à Picasso à la catégorie « génie », à égalité avec Léonard de VinciVelázquezRaphaël et Vermeer alors qu'il ne s'est attribué « qu'un » 19/20! 

"Il y a des jours où je pense que je vais mourir d'une overdose d'autosatisfaction"- Dalí

J'ai ainsi pu observer quelques oeuvres drôles issues de l'imagination de Dalí, souvent inspirées directement de ses rêves ou de son inconscient.

Ainsi ce téléphone-homard, aussi appelé Téléphone Aphrodisiaque (1938):


Dalí explique à ce sujet: "Je ne comprends pas pourquoi quand je demande du homard grillé au restaurant, on ne me sert jamais de téléphone cuit. Je ne comprends pas pourquoi le champagne est toujours servi frais et pourquoi à l'inverse, les téléphones, qui sont affreusement chauds et désagréablement collants au toucher, ne sont pas présentés dans des seaux d'argent avec de la glace pilée autour d'eux".


"Objet désagréable" à casser. 


Invention de faux-ongles miroir pour se remettre du rouge à lèvres en toutes occasions.

Exploration du cerveau d'Alice Cooper, qui était lié d'amitié avec Dalí. Dalí a réalisé un hologramme du cerveau du chanteur.

L'exposition présente bien sûr des comparaisons d'oeuvres de Léonard de Vinci juxtaposées à celles de Dalí (toutes des reproductions, les originaux sont dans leur musée d'exposition traditionnel), mais elle a vraiment je pense réussi son but.


Le reste du musée présente des collections permanentes de tableaux de Dalí. J'ai longtemps abhorré la période surréaliste et ses productions que je trouvais vraiment trop fantaisistes pour mon esprit cartésien. Je garde d'ailleurs un souvenir bizarre du musée Dalí visité il y a 4 ans à Figueras en Catalogne et où nous avions emmené des élèves. 


Pourtant, et j'en suis ravie, ce musée Dalí de Floride m'a bel et bien réconciliée avec son travail. 


Voici quelques oeuvres des collections permanentes:






"Désintégration de la persistance de la mémoire", 1952-54. Réinterprétation de sa toile "La Persistance de la Mémoire" (1931) 

Le tableau suivant m'a vraiment sidérée, pour plusieurs raisons. 

La première est que je n'en avais jamais entendu parler.

La deuxième est que quand vous êtes devant, vous ne voyez qu'une mosaïque de couleurs avec Gala, nue, qui contemple la Méditerranée par une fenêtre. Mais vous soupçonnez autre chose car les formes qui l'entourent sont vraiment disposées selon un agencement particulier. L'audioguide informe du titre de ce tableau," Lincoln", aussi connu sous "Gala nue regardant la mer". 

Lincoln


Le président américain apparaît dès lors que vous vous reculez d'une distance d'environ 20 mètres. Ce qui est fou, c'est que la photo ci-dessous, même prise de près, révèle le portrait, surtout si de surcroît vous plissez un peu les yeux. 


La double image. Moi qui suis friande de double sens, d'images cachées, de révélations secrètes, me voilà servie et en plus sans même l'avoir anticipé. Comme dirait l'un de mes anciens formateurs IUFM que je ne salue pas car il ne m'a rien apporté d'autre que cette formule: "c'est sioux!". Vraiment, Dalí, c'est chouette! L'utilisation des pixels avant l'heure. La déconstruction de l'image par la construction d'une autre, ou vice versa. Techniquement, s'agissant d'une peinture, c'est bluffant. 









J'ai été amusée par certaines peintures au nom surréaliste (c'est le cas de le dire!):


"Crâne atmosphérique sodomisant un piano à queue"
ou encore cette peinture dont j'ai photographié le titre tellement j'avais peur de ne pas m'en souvenir: "Crâne avec son appendice lyrique reposant sur une table de nuit qui devrait avoir la même température que le nid d'un cardinal".



CQFD. La preuve en image:




(Un appendice lyrique... vous m'en direz tant.)

Pour exemple, deux autres tableaux dont le titre vaut le détour:

"Dionysos crachant l’image complète de Cadaqués sur le bout de la langue d’une femme gaudinienne à trois étages"


Celui-ci se passe de traduction!

J'ai particulièrement aimé la construction de ce tableau, encore une fois avec une illusion d'optique flagrante sur la photo de l'oeuvre mais bien moins évidente quand vous vous trouvez devant le tableau appelé "Marché d'esclaves avec apparition du buste invisible de Voltaire":





Escalier du musée qui offre de belles perspectives tant en bas qu'en haut des marches, avec un appel de la lumière et une structure hélicoïdale épurée.
Mes coups de coeur de ce musée ont été l'architecture de l'escalier central, le téléphone-homard cité plus haut,  et surtout le tableau suivant appelé "Enfant géopolitique observant la naissance de l'homme nouveau":





Un passage rapide devant ce tableau n'a d'abord pas spécialement attiré mon regard. Mais les explications de l'oeuvre m'ont fait revenir sur mes pas et m'ont fait relire le tableau avec un regard tout autre, lui donnant sens et profondeur, au point d'y passer de longues minutes pour l'admirer et me rendre compte du puissant effet qu'il a eu sur moi (m'inspirant aussi la réflexion suivante: nos yeux ne voient quelquefois pas ce que les vues de l'esprit de l'autre ont à offrir). 


L'impression d'ouvrir une boîte à surprises!


Qu'y voyez-vous?


Remarquez déjà la forme des continents: Amérique du Sud, Afrique, Asie au loin. L'homme naissant écrase de sa main le Vieux Continent. La fêlure de l'oeuf correspond à la dorsale océanique  qui sépare l'ancien du nouveau monde. 


Je vous livre une explication très percutante d'André Bouguénec dans son livre Salvador Dali: Philosophe et Esoteriste incompris concernant ce tableau


 "La géodésie est la science qui a pour but de mesurer la surface de la Terre. La géopolitique est l'art de gouverner les états de la Terre. En disant que la géopolitique est L'Œuf cuit dur de la géodésique, Dalí signifie par là que la politique est pondue par le fait même de l'emplacement de ces états sur la surface de la Terre, de leurs formes et superficies également. La politique est L'Œuf dur, parce qu'elle semble inéluctable des conditions précitées, elle est cuite, c'est-à-dire figée et morte, sans espoir d'éclosion et d'épanouissement d'un grand Corps, d'un grand Ensemble. Un œuf cuit n'a pas de possibilité de vie.
Le drame de la Terre, ce sont ses politiques de situations, de stratégies, et cela est évident Et il est aussi évident que le renouvellement de nos erreurs politiques nous mène à rien, sinon au néant, à l'anéantissement de cette Terre même qui est notre Matière, notre Mater, notre Matrice, notre placenta. A condition, évidemment que cet œuf matriciel ne soit pas mort, cuit, pollué, inapte, (aussi bien la terre que l'homme) mais vivant et pur, et "naturellement" "couvé" par l'homme.
(...)

La réponse est dans ce Sang qui sort de cet œuf, il est le symbole de la Vie, car en effet, il n'existe Universellement, sous toutes formes : que de la Vie en transformation, en métamorphoses. L'Œuf est une reconduction génétique perpétuelle, et se trompent ceux qui pensent que la Genèse a eu lieu, car elle est permanente de régénération perpétuelle. Et Dali l'explicite fort bien. L'enfant géopolitique, né de la dégénérescence des sources déformées et amaigries des faux esprits, regarde le Nouvel Homme sortir adulte du sein du Monde. Apeuré, il s'accroche encore aux vieux préjugés de ses ancêtres : sa mère vieille et décharnée. Un nouveau Jour pointe, le soleil est à l'Aurore d'une nouvelle ère et éclaire ce lever humain qui, laborieusement, se déloge du contenant où il germa.

Que dit la femme à l'enfant, en lui désignant d'un air plein d'amertume ce nouvel homme?
A chacun d'en deviner la leçon. Pourtant cette ouvre fut peinte en 1943. Non seulement la femme, qui représente la fausse maturité du vieux monde, désigne l'Homme nouveau, mais aussi le continent de l'Amérique du Nord, par où il sort. Hasard chez Dali, ou prophétie, qui sait les drames que subissent les américains actuellement vont-ils leur ouvrir les yeux sur un "nouveau monde" dont ils croyaient être issus et les pionniers, jadis ? Tandis que le monde est en feu, Dalí peint la naissance d'un nouvel être humain. Angoissant, cherchant la protection maternelle, un enfant regarde comment un homme se débat pour se libérer d'un œuf plastique dont dégoulinent les continents. Nous sommes ici confrontés au symbole d'un ordre nouveau, d'un nouveau départ pour un nouveau monde parfait. La peinture est un plaidoyer pour une libération radicale de l'étreinte étouffante du passé. Dans les premières phrases de son manifeste publié quelques années auparavant, Dalí disait : « Lorsqu'un peuple, dans le courant d'une histoire culturelle, ressent le besoin de couper les liens intellectuels qui le retiennent aux systèmes logiques du passé pour se procurer une mythologie indépendante – une mythologie parfaitement adaptée à l'existence et à l'expression totale de sa réalité biologique et reconnue par l'élite intellectuelle d'autres peuples – l'opinion publique de la société pragmatique exige, tenant compte de sa propre systématique, que les motifs de cette rupture avec les formules traditionnelles obsolètes soient clarifiés."


Précisions de Mel Vadeker: "Ce tableau date de 1943 et pourtant il annonce très clairement que si l’humanité veut se perpétrer elle doit absolument renaître pour accéder à un nouveau stade de son évolution. Ce sont alors les douleurs de la naissance comparables à celui de l’Homme nouveau du tableau de Dalí qui l'attendent. Une naissance difficile pour un homme nouveau libéré de l’avidité, de la malveillance de l’Homme ancien et de son engagement dans une géopolitique de domination des autres pays, de contrôle des ressources naturelles, de rivalités, de conflits perpétuels. Utopie ou thème prophétique, ce qui est annoncé est tout simplement l’Homme nouveau purifié de l’égoïsme du passé, du désir de conquête et du manque d’empathie. Si cette nouvelle humanité arrive à naître, ce sera celle où l’harmonie et la collaboration prédominent sur les intérêts particuliers. Il est vrai que cette humanité n’est pas encore née."

L'Europe sous le joug nazi, le monde en guerre, l'exil de Dalí ont aidé à la création de cette oeuvre aux significations multiples. Je n'avais vraiment pas vu tout ça en regardant le tableau en première lecture. Fascinant, n'est-ce pas?

Une très belle visite qui s'est terminée par une promenade dans la marina de St. Petersburg, voisine du musée sous un soleil de plomb. 




lundi 20 avril 2015

Chez les Mayas.


C'est après une longue période de silence que je suis de retour pour vous conter mes nouvelles aventures dans le Nouveau-Monde. Avec un mea culpa par anticipation: j'ai des articles en retard en cours d'écriture, concernant notamment mon séjour de février qui a permis la découverte fabuleuse du Kennedy Space Center à Cape Canaveral. Je compte sur votre patience avant sa publication! 

Avant de vous plonger la tête dans les étoiles, je vous emmène dans la mer des Caraïbes. "Encore!" vous allez me dire!? Oui! Mais cette fois-ci, dans les Caraïbes de l'ouest, et plus précisément dans la péninsule du Yucatán, au Mexique.

Le départ s'est fait cette fois-ci du port de Tampa, à seulement une heure et demie de la maison. Nous repérons de loin l’immense paquebot de croisière qui sera le nôtre, le Brilliance of the Seas, de la Royal Caribbean. 13 ponts, c'est-à-dire plus petit que le paquebot qui nous a emmenés l'an dernier aux Bahamas, mais tout de même!

Cette croisière a été l'occasion de comparer la Royal Caribbean avec Costa et Princess Cruises. Le premier constat, confirmé par la suite du séjour, est sans appel : Costa et Princess sont d’un standing vraiment supérieur à Royal Caribbean.
 
Puisque nous nous rendons en escale au Mexique, les procédures d’embarquement concernent à la fois l’immigration et la santé. Pour éviter une quelconque épidémie à bord pendant ces quatre jours de croisière, le personnel tente de s'assurer que personne n'embarque avec une fièvre ou une toux ou un virus intestinal. Déclaration sur l'honneur, mais le personnel invite donc tout passager potentiellement malade à se faire voir par le médecin de bord avant d’embarquer pour éviter la propagation de microbes et d’épidémies. L’ennemi numéro un est Ebola. L’ennemi numéro deux est la gastro, ou Norovirus ( ou virus de Norwalk en français dans le texte).  Une croisière a récemment  fait les grands titres aux Etats-Unis pour avoir été un véritable cauchemar sur mer avec plus de 600 personnes infectées, soit un quart du paquebot, et une difficulté importante d'éviter la propagation des microbes en lieu clos. De ce fait, tout comme l’an dernier, des distributeurs automatiques de désinfectant Purell sont disposés partout: devant les ascenseurs, à l’entrée des restaurants et buffets (un personnel est spécialement posté pour vérifier que tout le monde se prête à la manœuvre  hygiénique), sur les ponts d’amusement, dans les arcades de jeux…  On vous rappelle aussi par écrit dans les toilettes de bien vouloir éviter de toucher la clenche (ah pardon, chers lecteurs non mosellans : la poignée) des toilettes ou alors avec du papier, mais les portes sur un bateau étant difficiles à pousser et lourdes, il est souvent difficile de faire autrement.
 
Revenons à nos moutons. Une fois les formalités passées, direction le pont d'embarquement. Ça commence fort pour moi : ma carte de bord magnétique ne passe pas. Un gros BIP signale à l'agent que je ne suis pas autorisée à monter. Regard suspect des agents qui scannent les cartes, mettez-vous sur le côté, attendez-là. Il revient quelques instants après, re-scanne : c'est bon ! Je peux embarquer. Ç'aurait été ballot, comme on dit dans l'ouest...

Les chambres n’étant pas encore ouvertes, les passagers sont invités à aller prendre le repas au buffet  à volonté servi Pont 11. C’est à ce moment très précis qu'il faut surpasser l'agoraphobie qui vous envahit soudainement et qu'il faut- c'est impératif- refouler bas, très bas (encore plus bas) les envies de meurtre qui montent en vous au milieu de ces foules bruyantes et voraces, en shorts et tongs qui viennent là pour se remplir la panse et peu importe comment (et encore... reconnaissons à ces foules le mérite d'être américaines, c'est-à-dire disciplinées: on ne joue pas des coudes et on ne pousse pas. Rien à voir avec la croisière Costa en Méditerranée remplie d'Italiens euh... comment dire pour rester polie et ne pas froisser d'éventuels lecteurs italiens ou d'origine? Franchement mal élevés et sans aucun respect de la nourriture et encore moins des personnels ô combien serviables et attentionnés de ces navires à touristes). Et quand vraiment vous sentez que vous êtes sur le point de perdre la lutte, une seule solution: le demi-tour pour aller prendre l'air sur un pont et faire en sorte de revenir un peu plus tard. Sur un paquebot de croisière en partance pour les Caraïbes, on ne meurt pas de faim et on peut manger 24h/24, à volonté et "gratuitement" pour ainsi dire, car tous les repas, du snack au dîner "gastronomique" sont compris dans le prix de la cabine, ainsi que toutes les boissons non alcoolisées (eau, citronnade, [véritable] thé glacé, café et thé) à volonté. 

Nous avons donc décidé  de laisser nos semblables se soulager pour faire connaissance avec le paquebot, qui bien que plus petit que le Ruby Princess qui nous a emmenés aux Bahamas l'an dernier n'en demeure pas moins un géant des mers. Treize ponts, 2500 passagers, 860 membres d'équipage, ce n'est pas un caïque, un coureauleur ni un bolincheur*!

Quelques clichés du Brilliance of the Seas: 

Le paquebot amarré dans notre port d'escale (et à sa gauche, la grande soeur, le Liberty of the Seas, encore plus imposant!):


Le Pont 12, centre de l'activité diurne (piscine, jacuzzis musique, bar) mais aussi le cinéma en extérieur le soir sur écran géant.
Deux vues du grand hall central avec bars, piste de dance, scène pour les concerts ou séminaires, et les ascenseurs panoramiques qui dominent le centre du paquebot. D'autres ascenseurs panoramiques donnent sur la verrière qui donne sur la mer. Sensation bizarre que de monter ou descendre en même temps qu'on avance sur l'eau!



Les transats du Pont 12, souvent arpenté, surtout après les buffets à volonté!
Mur d'escalade Pont 13.

Terrain de basket Pont 12.

Une vue de notre cabine:


L'autre tiers  de la chambre:


La cabine est bien plus exiguë que celle de l'an dernier mais il y a une raison: la réservation de la croisière s'étant réalisée très tardivement, il n'y avait plus de chambre handicapée disponible. Plutôt que de passer son tour, Joseph a voulu tenter une chambre "normale", c'est-à-dire sans aucun critère d'accessibilité, après avoir néanmoins vérifié la largeur de la porte d'entrée. Et le moins que l'on puisse dire est que c'était millimétré... Il a pu se permettre cette "fantaisie" en raison de son exceptionnelle condition physique et musculaire, mais très franchement on ne conseille pas pour d'autres personnes avec des problèmes de mobilité car c'était quand même fastidieux. La cabine de douche et les toilettes n'étaient pas accesssibles du tout. Il devait laisser son fauteuil dans la chambre et ramper pour y accéder à chaque fois après avoir escaladé la petite marche à l'entrée (sans siège ni équipement, nous avons dû demander un tabouret de douche en plastique à notre arrivée). Impossibilité aussi d'aller sur le balcon...Heureusement que le paquebot comportait plein de toilettes handicapées extra larges, ultra-modernes et équipées pour éviter de trop solliciter des épaules. Néanmoins, il a choisi de procéder ainsi donc il eût été complètement déplacé d'exiger quoi que ce soit de la compagnie en compensation. Nous avons quand même tenté, dès notre arrivée, de savoir s'il était possible de changer pour une chambre accessible mais on nous a dit qu'elles étaient toutes déjà occupées et impossibles à changer. [Nous n'avons repéré qu'une seule autre personne en fauteuil manuel sur le navire. D'autres personnes utilisant des déambulateurs ou des "scooters"  électriques (le type que l'on trouve dans nos supermarchés), pour cause de vieillerie ou d'obésité. Comme on dit en anglais, "no offense, but...". Bref.]

Le paquebot a largué les amarres à 16h de Tampa. Nous avons navigué une journée et demie sur le Golfe du Mexique selon la route suivante:


pour arriver sur l'île de Cozumel, au Mexique, au petit matin samedi vers 7 heures heure locale, soit 14 heures heure française.

Cozumel appartient administrativement à l'état mexicain du Quintana Roo, mais sa proximité  géographique l'associe souvent de fait à celui du Yucatán voisin. Yucatán particulièrement célèbre pour abriter le foyer de la civilisation maya, dont l'une des splendeurs, Chichen Itza, a été reconnue comme l'une des sept nouvelles merveilles du monde. Le Quintana Roo n'est pas en reste puisqu'il abrite la cité maya de Tulum ou encore la proche ville touristique de Cancún. Il est à savoir que le Yucatán et le Quintana Roo ne représentent pour l'heure actuelle aucun danger de visite contrairement à d'autres états du Mexique formellement déconseillés aux touristes. J'ai pris soin avant le départ de consulter le site du Ministère des Affaires Etrangères pour m'assurer de la faisabilité "politique" des visites, car certaines excursions à la journée proposées par la Royal Caribbean étaient sur le Mexique continental.

Cozumel, Mexique

Comme dans toutes les croisières, les vacanciers ont le choix entre multiples activités pour utiliser leur escale: soit une activité organisée par la compagnie, soit du temps utilisé librement à bord ou sur le port d'escale par ses propres moyens. La plongée avec masque et tuba pour observer les fonds comme l'an dernier était vraiment très tentante dans ces eaux turquoise et limpides, mais je pense qu'il était difficile, me concernant, de faire l'impasse sur la visite d'un site maya vu le peu de temps de présence au Mexique (8 heures tout au plus). Sujet longtemps étudié dans mes années de lycée et d'université, les civilisations pré-colombiennes qui m'ont longtemps fait rêver et même quelque part orienté dans mes choix d'études étaient désormais à portée de main pour quelques heures au cours d'une destination  de circonstance. Et le comble, si j'ose dire, est que je ne m'étais pas du tout projetée dans cette croisière jusqu'à la veille du départ, si bien que c'est vraiment émerveillée que j'ai découvert l'histoire du lieu avant de m'y rendre. Le plaisir n'en fut que plus grand de me retrouver sur le site archéologique de San Gervasio deux jours après.

La question, au moment de débarquer au Mexique, était néanmoins de savoir si la visite était faisable en fauteuil roulant, et déjà si le bus que nous devions prendre était en mesure de nous accueillir... Nous avons posé la question dès l'entrée sur le bateau. Le service des excursions nous a promis une réponse brève. Nous l'attendons encore à ce jour et c'est, comme souvent, en tentant sa chance et en mettant les gens devant le fait accompli que nous avons obtenu une réponse favorable du sympathique trio qui nous a accompagnés pendant une demi-journée. La guide commence par nous dire "ah non, pas de place dans le bus pour un fauteuil, désolée..." quand elles nous a vus arriver, mais rapidement on lui explique qu'il est question de monter l'homme dans le bus et le fauteuil en soute à bagage. Changement radical de réaction: "Mais bien sûr, pas de problème!!!". Et ben voilà!

Nous voilà donc partis pour un tour de l'île en bus avec comme point d'orgue la visite du site archéologique maya.

J'ai senti l'adrénaline monter en passant les barrières avec le panneau "site réservé" ainsi qu'un sentiment de réjouissance extrême en avançant dans la végétation luxuriante et en voyant ces pierres grises apparaître au milieu. Tant d'images sont remontées à la surface, tant de souvenirs de thématiques enfouies quelque part dans ma tête sont revenues au galop en entendant les explications de nos deux guides. La première, Barbara, a dressé un tableau historique et géographique de l'île de Cozumel. Comme bien des lieux du nouveau monde, les légendes autour de l'origine des noms sont foison. Il s'agit, la plupart du temps, d'hypothèses sur des déformations linguistiques post-colombiennes. Barbara nous explique ainsi que "Yucatán" proviendrait en fait d'un malentendu entre les conquistadors qui demandèrent à des individus mayas "où sommes-nous?", ces derniers leur ayant répondu  "Ma'anaatik ka t'ann", paroles  qui signifient en maya yucatèque "on ne comprend pas ce que vous dites". 
 
Cozumel vient du maya yucatèque Kosom Lumil, "terre d'hirondelles". Les transformations du maya yucatèque vers l'espagnol ont transformé en cuzaam luumil, puis  cuz'amil puis Cozumel.
Les Mayas  se seraient installés à Cozumel à partir du début du premier millénaire après Jésus-Christ.

Ared, la deuxième guide, s'est concentrée sur les explications propres au site archéologique.

Ix Chel, déesse lune et déesse de la fertilité

Pour les Mayas, Cozumel était une île sacrée pour la déesse Ix Chel. Cette déesse, aussi appelée Chak Chel, était associée à plusieurs éléments. Ix Chel était l'épouse du Dieu Soleil, et en tant qu'élément féminin elle était donc la déesse de la Lune. Mais c'est surtout pour la fertilité, la maternité et la féminité que cette déesse était vénérée. Les femmes Mayas qui désiraient avoir des enfants devaient se rendre en pèlerinage une fois dans leur vie à Cozumel pour prier Ix Chel pendant 3 jours et lui apporter une offrande. Le site de San Gervasio, aujourd'hui en ruines, était ce haut lieu de pèlerinage.

Ix Chel était représentée comme une vieille femme peu avenante, avec un serpent sur la tête (âge et serpent étant symboles de sagesse) et des oreilles de jaguar. Elle déverse une cruche d'eau, eau qui apporte la vie et est souvent représentée les jambes écartées, pour signifier la naissance. La guide nous explique que dans certains villages du Quintana Roo, les femmes accouchent encore debout les jambes écartées car cette position est d'après les Mayas la meilleure qui soit pour donner la vie, et en tout cas la plus en accord avec la position naturelle du corps.



L'eau déversée par Ix Chel fait aussi référence à l'île de Cozumel, aussi appelée l'île aux femmes. L'île est une représentation en soi de la maternité car de même que l'île est entourée d'eau, le futur bébé est entouré de la poche d'eau qui le fait grandir et apporte la vie.

Les aspects bienfaisants d'Ix Chel trouvent aussi leur équivalent maléfique (d'où la représentation peu avenante de la déesse) car cette eau peut également être associée au déluge et la destructiondu monde (pluies tropicales, ouragans, inondations).

L'association de la déesse à la Lune et la Fertilité ferme donc le cercle des symboles car la notion de cycle lunaire et de cycle féminin sont parallèles et indiquent des croissants de fertilité.

Vénérée et crainte, donneuse et destructrice de vie, bienfaisante et malfaisante, Ix Chel est un pilier de la mythologie maya et un important symbole de féminité.

Culture maya

Nous avons eu une explication sommaire du calendrier maya. Les Mayas utilisaient un système de numération en base 20.  Le "mois" maya (uinal) est composée de 20 jours

20 est la décomposition de  13+7, 7 et 13 étant deux nombres sacrés.

Il y a 18 "mois" de 20 jours qui composent le tun (année), soir 18x20= 360 jours.
La dernière semaine étant de 5 jours, on retombe sur le calendrier grégorien.

Ared nous explique le calendrier


D'après Ared, le concept de "fin du monde prévue par les Mayas" est une ineptie car tout dans la culture maya fonctionne en cycle et rien n'est linéaire (cycle de vie, cycle de fertilité, cycle de la lune, ...). Les calculs impliquent donc un recommencement éternel car la fin d'un cycle annonce de ce fait le commencement d'un nouveau.

Ared a poursuivi avec des explications architecturales propres aux Mayas, en rapport avec leur numération basée sur le nombre 20 (7+13). Elle nous indique par exemple que les quatre face de la pyramide de Chichen Itza comportent chacune 91 marches (soit 7x13). Sur le site de San Gervasio que nous avons visité subsitent des traces de cette architecture en plus petit volume. 

7 marches pour cet autel.
7 pierres pour cette voûte


D'autres vues de ce site:










Et quelques vues de Cozumel, pêle-mêle, pour le dépaysement:










Comme souvent, mes visites me donnent des envies d'encore. Les Mayas n'ont sans doute pas dit leur dernier mot et ont encore beaucoup de secrets à me révéler. En attendant, c'est comblée que je rentre car l'inattendu, la découverte et le dépaysement auront permis à ma curiosité de s'abreuver et de s'aiguiser encore. J'ai, je pense, de nombreuses lectures à effectuer pour la satisfaire et cette marge d'accès à la connaissance promet d'autres découvertes. En attendant, comme on dit en maya, dyos bo’otik et ka’a xi’itech!



* Je cherchais des types de petits bateaux pour comparaison et je me suis laissée entraîner par mes recherches ou plutôt mes trouvailles, du coup je vous en fais profiter!